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Capitaliser
sur la marque
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Les
extensions de marque |
Nous
avons vu précédemment que le développement
du capital d'une marque était un processus lent
et coûteux. Dans de nombreux cas, le capital d'une
marque ne doit pas servir à vendre qu'un seul
produit. En effet, afin de rentabiliser les investissements
de notoriété et d'image, les entreprises
lancent de nouveaux produits signés ou cautionnés
par des noms de marques existants. De plus, Le cycle
de vie de la marque est en corrélation directe
avec les cycles de vie des produits. Afin de préserver
la force et la stature d'une marque mère, les
entreprises doivent lancer de nouveaux produits pour
remplacer ceux qui s'érodent. Elles peuvent
alors se servir de l'actif de la marque mère
comme levier pour créer des extensions de marques.
Nous pouvons distinguer deux types d'extensions :
- L'extension de catégorie, qui va s'appuyer
sur une marque existante pour lancer un produit dans
une nouvelle catégorie de produit. Nous parlons
ici de profondeur de la marque pour savoir sur combien
de catégories elle évolue.
- L'extension de gamme ou de ligne, qui va utiliser
une marque existante pour lancer un produit à
travers une même catégorie. Nous évoquons
dans ce cas la notion de largeur de gamme pour connaître
le nombre de produits présents dans une même
catégorie pour une marque donnée.
Nous pouvons distinguer les extensions de gamme horizontales,
où le produit qui est lancé ne possède
pas de différences de prix ou de qualité
significatives par rapport à la gamme de produit
existante. Puis les extensions de gamme verticales dans
lesquelles le prix et la qualité du nouveau produit
diffèrent du standard de la gamme existante (Keller
2003 ; Michel, 2005).
Aujourd'hui, les lancements de produits représentent
pour 17% des extensions de catégorie et pour
65 % des extensions de gamme, ce qui montre que le lancement
de produits radicalement nouveaux est rare (Michel,
2005).
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Les
avantages d'une extension de marque |
Tout
d'abord elle permet de faciliter l'acceptation du
nouveau produit avec :
- Une association avec une image de marque déjà
existante, facilitant les inférences avec
la composition et la performance du nouveau produit.
- Une réduction du risque perçue par
le consommateur qui connaît déjà
les garanties de la marque.
- Une plus grande probabilité de convaincre
les distributeurs de mettre le nouveau produit sur
le marché, car ils connaissent la marque.
- Une meilleure efficacité de la promotion
lors de son lancement, car le marketing n'a pas
besoin de faire des efforts de communication à
la fois sur la marque mère et le nouveau
produit comme dans le cas du lancement d'une nouvelle
marque. En communicant sur un produit du même
nom, les bénéfices envers la marque
mère découleront.
- Une économie au niveau des coûts
de développement d'une nouvelle marque, comme
la création du nom de marque, du logo, des
symboles, du packaging, du slogan
- Une plus grande efficacité des labels et
du packaging présents sur le nouveau produit.
En effet, ils ont déjà une certaine
notoriété leurs permettant d'apporter
une plus grande visibilité au consommateur.
- L'apport d'une plus grande satisfaction aux consommateurs
qui cherchent de la variété car ils
sont saturés ou s'ennuient d'un produit.
Puis,
l'extension de marque permet d'apporter des bénéfices
à la marque mère avec :
- Une clarification de sa signification auprès
des consommateurs.
- Un rehaussement de son image de marque, en renforçant
la force de ses associations, de ses valeurs et
de son positionnement sur le marché.
- L'apport de nouveaux consommateurs et l'augmentation
de sa couverture de marché. Par exemple,
la marque d'automobile Kia a pu conquérir
de nouveaux segments avec la création d'un
nouveau modèle haut de gamme, Opirius.
Cela a permis à la marque de toucher le
segment du luxe, faisant de la concurrence à
Mercedes classe E.
- Une revitalisation, en apportant un intérêt
supplémentaire au consommateur. (Keller,
2003).
Parmi
les autres avantages :
- Delvecchio et Smith (2005), montrent que l'extension
d'une marque forte dans une nouvelle catégorie
de produit permet d'acquérir une prime
de prix, avec des marges par produit plus élevées
que pour des produits comparables associés
à des marques au capital faible. Ils trouvent
que la marge des produits des extensions de marque
est corrélée positivement au "fit"
qu'il peut exister entre la marque et la catégorie
de l'extension.
- Smith et Daniel (1992), observent que le rendement
de la publicité est supérieur pour
les extensions de marque que les nouvelles marques.
Mais aussi que la force de la marque n'a pas d'effet
significatif sur l'efficacité des extensions
de marque.
- Balachander et Ghose (2002), montrent que les
publicités des extensions de marque affectent
favorablement l'image de la marque mère
ainsi que sa notoriété.
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Les
désavantages d'une extension de marque |
L'extension
de marque a aussi des désavantages, en
effet elle peut :
- Rendre confus le consommateur qui peut se demander
quelle est la meilleure version du produit pour
lui, proposée par la marque.
- Echouer et ainsi venir ternir l'image de la
marque mère.
- Venir cannibaliser les différents produits
de la gamme. Par exemple, le Mac Mini de la société
Apple bien moins cher que l'Imac peut venir amoindrir
la perception de la valeur ajoutée des
ordinateurs Apple et cannibaliser les ventes des
appareils haut de gamme de la marque. Kumar (2005),
montre que le co-branding peut aider à
se protéger contre ce phénomène
de cannibalisation.
- Diluer l'image de marque surtout dans le cas
d'une extension verticale où le consommateur
ne perçoit pas aussi uniformément
l'image prix et qualité de la marque globale.
- Faire oublier de part son utilisation systématique,
les avantages qui peuvent exister à lancer
une marque radicalement nouvelle pour un produit
donné (Keller, 2003).
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Les
conditions clé de succès |
La
recherche académique s'est largement centrée
sur le domaine de l'extension de marque en cherchant à
identifier les facteurs clés de succès de
cette stratégie et sa retombée sur la marque
mère (Michel, 2005).
Les conditions clé du succès résident
tout d'abord dans l'habilité à établir
un capital de marque pour l'extension de marque. Pour
cela l'extension de marque doit obtenir un niveau suffisant
de sensibilisation auprès du consommateur avec
des associations fortes, favorables et uniques dans la
mémoire du consommateur.
La création d'une image positive pour une extension
va dépendre de trois facteurs :
- La force des associations de la marque mère présentes
dans l'esprit du consommateur lors d'un contexte d'extension.
C'est-à-dire quelle information arrive dans l'esprit
du consommateur quand ceux-ci pensent à l'extension
proposée. Les recherches auprès des consommateurs
sont donc essentielles avant le lancement d'une nouvelle
extension.
- Le fit qu'il existe entre l'information qui est dégagée
par le nouveau produit et la catégorie de produit
auquel il désire appartenir. Selon Cohen et Basu
(1987), l'attribution d'un nouvel objet dans une catégorie
mentale dépend de la similarité physique
avec les autres membres de la catégorie.
- Le niveau de différenciation de l'extension de
marque par rapport à sa catégorie, les perceptions
du nouveau produit devant être différentes
de celles des produits des compétiteurs dans la
même catégorie.
Ensuite,
pour réussir une extension doit bénéficier
d'associations favorables et uniques avec le capital
de la marque mère (Keller, 2003).
La littérature sur l'évaluation des extensions
par le consommateur met en lumière ce fait. La
majorité de ces études utilisent l'approche
catégorielle avec l'organisation de la mémoire
en catégories et ses implications, pour expliquer
la façon dont est traité l'information
par les individus. Elles étudient les conditions
permettant au produit en extension de bénéficier
du transfert d'attitude de la marque mère, pour
être évalué de façon positive
par le consommateur (Seltene, 2004). La condition qui
apparaît primordiale afin d'obtenir une évaluation
positive est la similarité entre les produits
de la marque et la catégorie de produit de l'extension
(Aeker et Keller, 1990 ; Boush et al, 1987 ).
D'autres études vont étudier la relation
entre la marque mère et l'extension à
partir de l'image, des associations et du concept de
la marque mère. Une des clés de succès
pour une extension réside dans le " fit
" qu'il doit exister entre la catégorie
de produit de l'extension de marque et les associations
véhiculées par la marque mère,
c'est-à-dire son image (Broniarczyk et Alba,
1994 ; Park, Milberg et Lawson, 1991). Par exemple,
une marque de cigarette ne peut pas se mettre à
vendre du café de commerce équitable,
car cela n'est pas en adéquation avec les valeurs
de la marque mère.
En fin de compte, l'évaluation de l'extension
de marque est expliquée par la distance entre
la marque et l'extension qui est principalement conceptualisée
par le fit, la typicalité et la similarité.
Cette distance exprime la capacité de l'extension
à " profiter " de la marque pour bien
être évaluée par le consommateur
(Seltene, 2004).
Pour réussir, une extension de marque doit donc
trouver le juste milieu entre la différenciation
qu'elle arbore dans sa catégorie de produit pour
développer son propre capital de marque et la
similarité d'évocation qu'elle a avec
l'image ou la catégorie de la marque mère.
Les responsables du marketing devraient lors du choix
de l'extension considérer tout particulièrement
les associations de la marque mère qui font référence
au positionnement et aux bénéfices centraux
de celle-ci. Dans le cas d'une extension de catégorie,
ils doivent observer quelles catégories de produits
peuvent être en cohérence avec l'image
et les produits de la marque. Selon Meyvis et Janiszewski
(2004), les extensions de marque qui réussissent
sont associées aux bénéfices de
la catégorie dans laquelle elle s'étend.
Selon ces auteurs, le succès des extensions de
marque dépend aussi de l'accessibilité
de ces associations. Les marques larges avec un grand
portefeuille de produits tendent à avoir plus
d'accessibilité pour ces associations que les
marques étroites.
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Bibliographie |
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of Brand Extensions. Journal of Consumer Research,
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Journal of Consumer Research. Gainesville: Sep.
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Daniel. (1992). Brand Extensions and Advertising
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